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Il n'est pas de montagne plus haute que les marches de l'oubli

La soif du Pouvoir...

Le rapport annuel d'Amnesty International 2017-2018 sur l'Etat du Sénégal est très clair.

 

"Les droits à la liberté de réunion pacifique et à la liberté d’expression sont restés soumis à des restrictions. Les conditions de détention demeuraient particulièrement dures et les enfants ont été cette année encore contraints de mendier dans la rue. Peu d’efforts ont été faits pour empêcher les auteurs des violations des droits humains de bénéficier de l’impunité."

 

 

I.1 – Procès inéquitables

 

"Khalifa Sall, un dirigeant de l’opposition et maire de Dakar, la capitale, a été placé en détention le 7 mars 2017. Il était inculpé d’association de malfaiteurs, de complicité et usage de faux en écritures privées de commerce, de faux et usage de faux dans les documents administratifs, de détournement et escroquerie portant sur les deniers publiques, et de blanchiment de capitaux. La libération sous caution lui a été refusée à plusieurs reprises. Il a été élu au parlement en juillet alors qu’il était toujours détenu. En novembre, l’Assemblée Nationale a levé son immunité à la demande du parquet."

 

"Ses avocats et des groupes de l’opposition et de la société civile, dont Amnesty International Sénégal, se sont dits préoccupés par ce qui leur apparaissait comme un manque d’indépendance de la justice."

 

"Le procès de Khalifa Sall a finalement débuté au mois de janvier 2018 devant le Tribunal de Grande Instance de Dakar.

L’affaire Khalifa Sall confirme le caractère ciblé des poursuites lancées dans le cadre de la lutte contre la corruption et le détournement des deniers publics. Ces poursuites semblent viser uniquement des leaders de l’opposition alors qu’aucune suite n’est donnée aux rapports des corps de contrôle de l’Etat concernant la gestion des personnalités proches du pouvoir. Nous observons une absence d’égalité des citoyens devant la justice qui est tout à fait inacceptable dans un Etat de droit et qui doit prendre fin immédiatement."

 

I-3 Liberté d’expression

 

"Des journalistes, des artistes, des utilisateurs des médias sociaux et d’autres personnes qui exprimaient des opinions dissidentes ont été arrêtées de manière arbitraire.

Le 30 juin, la journaliste Oulèye Mané et trois autres personnes ont été interpellées pour « publication d’images contraires aux bonnes mœurs » et « association de malfaiteurs » après avoir partagé des photographies du président Macky Sall sur le réseau social WhatsApp. Elles ont été libérées le 11 août.

La chanteuse Ami Collé Dieng a été arrêtée à Dakar le 8 août et accusée « d’outrage au chef de l’Etat » et de « diffusion de fausses nouvelles » après avoir envoyé sur WhatsApp un enregistrement sonore critique à l’égard du président. Elle a été remise en liberté le 14 août."

 

Eléments d'explication:

 

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Le Président de la République nomme les membres du Conseil Constitutionnel (composé de 7 juges)

lors des dernières élections législatives, il a saisi ce Conseil afin de permettre aux Sénégalais qui n'avaient pas encore reçu leur nouvelle carte d'identité biométrique de pouvoir voter avec tout autre document.

Ces élections furent organisées dans la hâte, le 30 juillet 2017, pas moins de 47 listes électorales étaient en lice.

A Touba, fief des mourides, seules les listes du parti au pouvoir étaient accessibles, les listes de l'opposition introuvables, des dizaines de bureau de vote furent saccagés. Des centaines de milliers de sénégalais ne purent voter....

Il y a quelques jours, le Ministre de l'Intérieur chargé de l'organisation de l'élection présidentielle sort de sa neutralité affirmant qu'il fera tout pour la réélection du Président...

 

L'ancien vice-président de l'Assemblée Nationale donne une analyse "brutale" de la situation politique de son pays ("déclaration de Paris" parue dans Walfquotidien le 8 mars 218)

 

"Macky est le président le plus affaibli de tous les présidents depuis l'indépendance"

"Jamais président de la République n'a été, avec ses proches, autant chahuté, humilié, malmené, tourné en dérision"

"Macky suscite peu d'enthousiasme.

Son désir obsessionnel  d'avoir un deuxième mandat le pousse à tous les excès."

"L'Etat est aujourd'hui perverti par un homme qui a politisé à l'extrême l'administration sénégalaise."

"Macky Sall  est agité par des démangeaisons présidentielles pour un second mandat"

"Il ne doit pas tomber dans le travers du déni , ni suivre les voix des sirènes courtisanes qui l'enfument"

 

Réflexions personnelles

 

Je pense que le début de ce discours - dans ses 3 premières  phrases - n'est pas correct, mais il est vrai qu'à l'approche de l'élection présidentielle de 2019, on a la très nette impression que le Pouvoir en place n'agit qu'en fonction de sa réélection. Il faut aussi souligner qu'en dépit des invectives réciproques entre le parti au pouvoir et les partis d'opposition, la presse écrite jouit d'une grande liberté. Remarquable est le fait qu'elle ne s'adresse qu'à une minorité de sénégalais instruits.

 

Il en est tout autrement des médias télévisés auxquels la majorité des sénégalais a accès:

Sur l'étendue du territoire: 2 grandes chaînes de télévision:

   - RFM  et  SENTV  

A travers ces deux médias, on ressent assez fortement l'influence de l'Etat sur ces canaux d'information.

Remarquable aussi que les répressions de manifestations non-violentes de l'opposition n'y sont que très rarement relayées, laissant cette actualité à la presse journalistique.

 

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- Rfm appartient au Grand Youssou Ndour qui est également  ministre-conseiller et ami du Président. Il détient aussi le quotidien "L'OBS" qui est d'une neutralité politique avérée et qui a mon admiration.

 

 

- SenTV  et RFM parlons en!

 

A travers toutes les manifestations culturelles, ces chaînes n'ont de cesse de les placer sous le patronage du Chef de l'Etat, de la Première Dame et de la liste interminable des 40 ministres de Macky Sall sans compter les autres personnalités de sa sphère. A chaque événement, cette liste de personnalités défile sur l'écran avec leurs titres pompeux et leur image, ceci à longueur de journée. Ceci me semble outrancier, c'est un "endoctrinement" du pouvoir politique dans le prisme déformant de la perception qu'ont les citoyens envers le Pouvoir qui les dirige.

Louanger à longueur de journée des personnages de l'Etat, les impliquer dans toutes les manifestations culturelles  est outrancier pour des médias qui se targuent de neutralité politique.

 

La perception d'une partie des sénégalais sur l'exercice du Pouvoir est qu'il s'efforce de lancer de la poudre aux yeux de ses citoyens -en dépit de ses efforts certains afin d'améliorer certaines de leurs conditions de vie, mettant l'accent sur  les grands chantiers et les travaux de prestige dans une formule assez rémanente "le Sénégal émergent", pendant ce temps, des enseignants, des élèves boursiers ne sont plus payés depuis des mois, des citoyens de toutes parts lancent des cris d'alerte vivant le manque d'eau potable, le manque d'électricité, le manque de sécurité, le manque de soins de santé, le manque d'éducation...

 

Ce 9 mars, les forces policières empêchent un sit-in devant le Ministère de l'Intérieur dispersent les manifestants et "arrosent" une école de gaz lacrymogènes, de jeunes élèves asthmatiques doivent être évacués...Aucun document dans la presse télévisée, le lendemain dans la presse écrite, on apprend la responsabilité du vent dans cet incident...

Ce ne fut pas la première manifestation devant ce Ministère, les forces de police devaient bien connaitre la proximité de l'école et utiliser d'autres moyens plus adéquats pour disperser les manifestants...

Dans son édition de ce 10 avril le journaliste du quotidien "Enquête" cite le témoignage du directeur d'école: "ils ont jeté dans l'école des lacrymogènes, que ce soient enseignant ou élèves, tous le monde a inhalé du gaz lacrymogène...les grenades ont été projetées à l'intérieur même de salle de classe, sur des enfants de 6 à 14 ans...On fait semblant d'être un pays démocratique tonne ce directeur téméraire! (les forces policières dirigées par le Pouvoir en place parlent à nouveau de l'influence des vents contraires (En Afrique, tout est bon pour émasculer la vérité)

rien n'est fait malgré les protestations des organisations internationales et des ONG pour éradiquer le spectacle lamentable et injurieux des dizaines de milliers d'enfants talibés, coranisés outrancièrement...

 

L'affaire Khalifa Sall relayée par Amnesty, par les sénégalais des partis d'opposition et de la diaspora est sans doute une affaire politique. Elle signerait l'implication du Pourvoir exécutif sur le Pouvoir judiciaire. Elle est en tout cas soulignée par tous comme l'élimination d'un adversaire politique. Par contre, il est tout aussi désolant d'implorer l'intercession d'influence du Chef de l'Etat afin d'obtenir sa libération. S'il y eut influence de la plus haute autorité de l'Etat pour faire arrêter, emprisonner et juger le maire de Dakar - ce qui est loin d'être démontré - la même influence doit jouer pour sa libération mais alors on sort du cadre légal des Institutions. On est même plus dans un Etat de droit.

 

Par ailleurs, on a la très nette impression d'un pouvoir obstiné qui ne tient compte d'aucune revendication de l'opposition, la reléguant dans le silence de son autoritarisme. 

 

Doit être aussi cité la non-application des Droits de l'Homme en ce qui concerne l'état lamentable des conditions des détenus dans les prisons du Sénégal

 

Le député Moustapha Cissé Lo est très clair sur ce point après sa visite à la prison de Diourbel,

 

Là, on met des gens dans des paquets comme des sardines, on met les gens dans des conditions inacceptables, ces gens qui subissent la privation de la liberté doivent pouvoir jouir d'une vie décente, d'un minimum de confort."

 

GRAVISSIME: "Tous les citoyens ne sont pas traités au pied d'égalité au niveau de la justice: les enfants des personnalités commettent souvent des choses répréhensibles, mais ils ne sont pas emprisonnés, c'est presque leur jeu favori, au même moment, des gens qui ont détourné 100.000 fr (150 euros) purgent des peines en prison..."

 

 Enfin et parmi d'autres, tout en sachant qu'en politique, il n'y a pas de place pour une morale qui respecte les droits de l'homme, seuls les liens internationaux basés sur des accords économiques dont les effets se répercutent rarement sur le bien être des citoyens, sont de mise, preuve en est la condescendance du Pouvoir en recevant le Président d'un Etat voisin qui dans son propre pays, n'est nullement  le souffle de la démocratie

En politique comme dans tous les aspects de la vie publique, on ne pactise jamais avec les dictatures"

 

"Le Pouvoir, c'est quand vous avez toutes les raisons de tuer et que vous ne tuez pas"

 

(je nourris du respect pour ce Président  qui est certainement un homme de talents. Il usa excellemment de son influence dans la crise politique de son pays voisin, la Gambie. Il sait que sa tâche première est de défendre la démocratie de son beau pays. Je reste convaincu des grandes capacités politiques de cet homme. Comme tout homme revêtu du pouvoir, il rêve d'un avenir meilleur pour les siens, personne ne peux lui dénier cela, ce qui est souvent à craindre dans tous les pouvoirs africains, c'est d'une part  la sacralisation du Chef dans l'esprit de l'africain de base, c'est aussi sa dépendance aveugle et sa soumission, enfermé qu'il est parfois dans les structures non développées de son raisonnement. C'est une très grande dichotomie entre les "intellos" qui entourent le Pouvoir en place, prêts à faire feu de tout bois pour éviter à tout prix de perdre leurs multiples avantages financiers et le peuple infortuné de la majorité des sénégalais...



08/03/2018
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