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J'ai souvent évoqué le bonheur des hommes, leurs contingences dans leurs vies quotidiennes.

Tout est recherche du bonheur: celui de l'instant, celui du rêve projeté dans l'avenir, celui de l'enfance, "un voyage oublié".

La question qui me taraude toujours est celle-ci: existe-t-il une différence entre la quête du bonheur en Europe et en Afrique?

Des deux côtés, le bonheur se nourrit de l'instant et de projets, la seule différence est que l'africain intensifie le bonheur de l'instant

alors que l'européen se nourrit d'abord de projets.

Dans les deux cas, on ne poursuit que quelque chose qu'on entrevoit, qui correspond d'une certaine façon au désir profond, mais qui échappe toujours...

Le bonheur n'est pas une chimère: ce qui en serait une serait de croire qu'on l'a enfin atteint ou qu'on peut l'atteindre en plénitude accomplie dans le Temps.

Mais rien ne peut être accompli tant qu'on est dans la durée, qui est, de soi, inachèvement, changement, menace de fragilité.

Cela ne veut pas dire qu'on ne puisse être heureux dans l'existence, mais le drame est que ce bonheur, constamment "poursuivi"

ne puisse y être atteint dans la totale plénitude, justement à cause de la durée qui pourtant nous permet de l'entrevoir et de le chercher.

Malaise contradictoire d'être dans le Temps et de rêver d'une durée qui n'en finirait pas", c'est à dire qui ne serait plus justement de la durée...

Au fond, c'est la mort qui pose la vraie question du bonheur, puisque c'est à elle que conduit la durée...

La foi chrétienne comme la foi musulmane  expriment une dimension qui se dégage des mythes, dans le sens de ce qui n'est plus un espoir, mais une espérance" de la non-durée ce à quoi les hommes doivent accepter la cessation de la durée qui est la mort pour atteindre un bonheur perdu et retrouvé...