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Il n'est pas de montagne plus haute que les marches de l'oubli

La "laïcité de l'Etat et l'influence des confréries religieuses au Sénégal

Au Sénégal, le pouvoir politique a toujours courtisé le pouvoir religieux. Il y a quatre grandes confréries religieuses. Déjà sous le règne de Senghor président catholique, il finança la construction de la grande mosquée de Touba, le troisième khalife général des mourides appela à voter pour lui...Senghor a cependant toujours défendu une certaine idée de la laïcité établissant une distance entre l'Etat et les religieux.

Son successeur Abdou Diouf pratiqua la même neutralité.

A partie de 2000, Abdoulaye Wade est élu 3ème président du Sénégal.  Il est d'obédience mouride et est fortement appuyé par sa confrèrie. Au fur et à mesure de sa présidence il installera une "mouridisation" de l'Etat...créant par la même le mécontentement des autres confréries,bien qu'il courtisera aussi la confrérie des Tidjanes. (les mourides se sont toujours sentis exclus de la sphère publique. Wade fit un second mandat et renforça encore leur influence sur l'appareil de l'Etat.

 

Touba la capitale des mourides

 

Quelques avenues bitumées, des rues ensablées, un marché animé devant lequel s’entrechoquent des charrettes tirées par des ânes… À première vue, rien ne différencie Touba des autres villes sénégalaises. Pour comprendre où l’on se trouve, il faut regarder de près un plan de la ville et s’apercevoir qu’ici tout converge vers la grande mosquée, un édifice somptueux pourvu de cinq minarets qui culminent à plus de 60 m construit il y a cinquante ans à la gloire de la Mouridiya, l’une des deux principales confréries du pays, qui compterait (les données restent floues) 4 millions de disciples au Sénégal et à l’étranger. Il suffit aussi d’observer les habitants. À Touba, on ne fume pas dans la rue depuis que, en 1988, le troisième khalife général des mourides l’a interdit en prononçant un ndiguël (un « édit » consigne de vote) à cet effet. On ne boit pas d’alcool non plus. Et pour voir des matchs de foot ou des combats de lutte sénégalaise, il faut laisser derrière soi l’arche qui indique que l’on pénètre dans la ville sainte de Touba et se rendre dans la cité voisine de Mbacké.

 

La ville de Touba a beau se trouver au coeur du Sénégal, à trois heures de route de Dakar, elle s’apparente à un petit Vatican. Ici, celui qui décide de tout, c’est le khalife

 

 

Et personne, pas même le président de la République, n’est en mesure de lui contester ce pouvoir. Malgré une population estimée à plus de 1 million d’habitants (vingt fois plus qu’il y a trente ans) et un titre de « deuxième ville la plus peuplée du pays »

 

D’Abdou Diouf à Macky Sall, tous les Chefs d’Etat se sont attaqués à la mendicité des enfants de la rue au Sénégal. Ils sont tous reculé face à la pression de groupes religieux qui ont mené des campagnes contraires de protection de l’Islam et de son héritage au premier rang desquels les daaras, ces écoles coraniques dont le mode d’enseignement est contraire à ce quoi se fait dans les écoles modernes.


Bien sûr, le pouvoir politique craint le vote-sanction de la part de communautés qui n’hésiteront pas à exécuter la « fatwa » de leurs chefs.
La réalité, au Sénégal, c’est que les citoyens sont beaucoup plus obéissant au pouvoir religieux qu’au pouvoir politique. La preuve, chaque homme politique a son marabout qu’il écoute surtout au moment des choix importants.
L’ancien ministre Samuel Sarr disait par exemple que c’est son marabout qui lui a désormais interdit de s’attaquer à Macky Sall. Depuis lors, il s’est rapproché de lui. Et il est loin d’être le seul.


Mieux, si un problème surgit, l’autorité centrale de l’Etat et les autorités décentralisées se réfèrent d’abord aux marabouts.
Les Khalifes généraux sont les premières sollicités, mais, à côté d’eux, leurs frères, sœurs, enfants et autres parents bénéficient aussi de cette sollicitude source d’immunité de toutes sortes qui leur confèrent beaucoup d’avantages comme les passeports diplomatiques, des statuts d’Ambassadeurs itinérants, des marchés de l’Etat, etc.
C’est ce qui explique l’influence toujours plus grandissante du pouvoir religieux. Ce sont les Sénégalais eux-mêmes qui le veulent ainsi. Nous avons ainsi un système dit « laïque » mais qui est à forte connotation religieuse, avec cependant le seul garde-fou que la plupart des marabouts ont en tête la préoccupation de respecter au maximum les lois de l’Etat.

 

C’est la particularité de notre système politique.

Très inféodé au pouvoir religieux, il sait lui être docile, mais aussi hostile quand la situation l’exige.
C’est ce subtile dosage qu’il faudrait toujours réussir dans les relations

ô combien sensibles entre pouvoir religieux et pouvoir politique au Sénégal.
L’un a besoin de l’autre dans l’exercice de son sacerdoce.
Il faudra toujours respecter le pouvoir religieux, mais travailler à l’amener à appliquer la loi dans toute sa rigueur.

 



06/03/2018
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