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Il n'est pas de montagne plus haute que les marches de l'oubli

Ici les gens errent dans le labyrinthe chaotique et poussiéreux de leur vie

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(n'oubliez jamais de cliquer sur les photos qui vous plaisent pour agrandir)

 

Dans mon quartier noir, beaucoup de gens ne possèdent qu'un seul objet. Pour l'un, c'est une chemise, un autre un "paaka", c'est-à-dire une machette, un troisième une pioche dénichée on ne sait où. Celui qui a une chemise peut se faire embaucher comme gardien de nuit (personne ne voudra d'un gardien à moitié nu), celui qui a un paaka peut être employé pour couper les mauvaises herbes, celui qui a une pioche peut creuser un fossé. Ceux qui n'ont que leurs muscles à vendre espèrent être embauchés comme porteurs ou commissionnaires. Dans tous les cas de figure, les chances sont minimes, car la concurrence est rude. Ce ne sont que des emplois occasionnels, pour un jour, pour quelques heures...

 

C'est ainsi que dans mon quartier grouillent des gens désoeuvrés. Ils se réveillent le matin et vont chercher de l'eau pour se débarbouiller à la manière des chats. Celui qui a de l'argent se paie un petit déjeuner fait de café, de pain et de chocolat.

Dans la vie de ces gens, tout est provisoire, mouvant et précaire.

 

Pourtant, nombreux sont ceux qui occupent de petits boulots, les vendeurs de cacahuètes grillées (souvent des enfants très jeunes), des vendeurs ambulants de toutes sortes: montres, lunettes de soleil, vêtements, berlingots d'eau, bracelets et colliers, cartes téléphoniques, bijoux (souvent des touaregs dans leur turban bleu venus du Mali proche )

 

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D'autres possèdent une "djakarta" (moto chinoise) et font le taxi pour quelques cents. Je les emprunte d'ailleurs chaque jour. Ils sont des dizaines à attendre les clients aux ronds-points ou près des grandes surface .

 

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Partout de grand matin, au coin des ruelles de sable, des femmes organisent les déjeuners dans des abris de fortune, une table et des bancs de bois derrière un paravent de toile,  les vendeurs de café ne dorment que quelques heures par nuit, ils vendent du café fait sur place d'eau chaude et de nescafé dans de petit gobelets en plastic blanc  pour 50 Cfa l'unité (7,50 cents d'euro)...

 

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Et puis il y a  les petits talibés,  les mendiants (ils sont surtout présents dans les grandes villes comme Dakar) et les jeunes handicapés  qui font la quête chaque matin.

 

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D'autres vendent les journaux du jour avec les nouvelles politiques et sportives de la veille ( 15 cents d'euro)

 

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Et puis tout au long des rues et des carrefours une foule de femmes marchandes vendant les fruits et légumes, elles sont des milliers dans la ville, parfois dix d'affilée vendant les mêmes produits : bananes, oranges, oignons, pommes de terre, ail, citrons...

ici, on n'étale pas l'argent, les vendeurs n'ont pas de tiroir-caisse, souvent le gros problème ici est le manque de monnaie, que voulez-vous, les blancs  comme en Europe s'approvisionnent aux distributeurs automatiques qui leur débitent des billets de 10.000 CFA, mais aucun petit vendeur ne peut donner le change, la plupart commencent leur journée avec 0 Cfa en poche, leurs premiers clients sont leur première monnaie. Ici, dans tous les achats des cités noires, personne n'a de monnaie, c'est aussi souvent le cas dans certains bistrots ou restaurants, le client attend le règlement d'autres clients...

 

L'Africain a l'esprit du commerce dans l'âme, le but n'est jamais le profit individuel mais l'échange,

ici l'argent garde sa vraie fonction: il est circulatoire.

Les maigres bénéfices du vendeur servent à nourrir un autre vendeur et le circuit n'en finit jamais.

l'épargne n'a ici aucune valeur sinon de l'argent endormi.

Ici tout est ECHANGE.

 

Pour vivre et assurer son repas, l'africain a appris à fractionner ses achats par très petites quantités, le sucre, les cigarettes, les fruits et légumes se vendent à la pièce, le poivre et autres condiments sont conditionnés par petits sachets de 10 grammes, ainsi cela autorise la variété de petits achats pour confectionner les repas. Beaucoup de sénégalais n'ont pas accès à l'électricité ni à l'eau, qu'importe, on s'éclaire le soir à la lumière de la lune, on cuit sur du charbon de bois ou des branchages ou des excréments séchés des zébus. Pour ceux qui ont accès à l'électricité, ils disposent un compteur de kw prépayé, partout , les ampoules de faible intensité éclairent le veillées d'Afrique. Dans les ruelles de ma cité noire, l'éclairage publique est fait de quelques lumières ça et là, ici existe encore les tombées du jour, le crépuscule et la nuit des hommes qui prépare leurs rêves.

 

 

La pauvreté n'est pas un manque d'argent, elle est même une richesse, la racine de la générosité et de la solidarité.

 

ET POURTANT... je ne peux me résigner à comprendre comment l'africain parvient à vivre...sans sa" famille". Très symptomatique de cet esprit, ici on est toujours le frère ou la soeur de n'importe qui. Cet aveu ne correspond nullement à un mensonge, à une dissimulation des vraies relations de sang mais à l'esprit qui relie tous les hommes.

 

ET POURTANT..

 

La "pauvreté" ne génère aucune plainte, aucune ride, elle est intérieure et vécue comme l'attente d'un meilleur-être

elle est un espoir qui a tout le temps d'attendre, elle n'empêche pas les sourires et les joies.

 

ET POURTANT...L'européen que je suis, rêve de "mécaniser" l'Afrique, à la machine qui allège le labeur des mains des hommes...

Dans la ville de Saly, de grand matin, les "ramasseurs de papiers" sont à l'oeuvre avec leur brosse et leur petite charrette...pour un maigre salaire, et si les gens apprenaient à ne plus rien jeter...? que ferait-on de ces hommes? et si on jetait tout ce qui nous embarrasse... on embaucherait...

 

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Parfois, on rencontre des piocheurs par équipe de 10 ou 12 tous les 100 mètres qui creusent une tranchée pour y enfouir des câbles souterrains, la transpiration et leur sueur dégouline sur leur dos luisants, et si on engageait un tractopelle... que ferait-on de tous ces hommes? on pourrait établir une liste infinie de petits métiers qui disparaîtraient et appauvriraient encore davantage "les hommes pauvres et nus" qui sont mes frères...

 

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Dans la brousse environnante, des paysans courageux retournent un mince couche de sol avec leur âne pour ensemencer la terre

Comme le sillon n'est pas suffisamment profond, la terre meuble et riche ne revient jamais en surface... et si on engageait des gros tracteurs...qui rendraient des hectares de terres plus fertiles chaque jour...

 

Que ferait-on de tous ces hommes??

 

L'avenir de l'Afrique est le lent accouchement des chemins que suivirent des millions de terriens.

 

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29/01/2018
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